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le Monde de kikushiyo
29 novembre 2015

La dictature des cas sociaux (violence intra familiale, échec scolaire et... attentats)

logo parisIl est étrange de constater que la plupart des terroristes français impliqués dans les attentats de Paris au cours de l'année 2015, que ce soit à Charlie Hebdo, à l'Hyper cacher de la Porte de Vincennes, ou plus récemment les attentats du 13 novembre, aient eu un parcours social et qu'ils aient été accompagnés par les services départementaux de Protection de l'Enfance de l'Aide Sociale à l'Enfance, ce qu'on appelait la DDASS. C'est-à-dire que, soit un juge pour enfants, soit un Président de Conseil Départemental a qualifié ces terroristes, durant leur minorité, d'enfants en danger ou en risque de danger dans leurs environnements familiaux. En quelque sorte, c'étaient des enfants victimes de carences éducatives ou de mauvais  traitements.

Déjà, le terroriste toulousain Mohamed Merah, avait été pris en charge plusieurs années par des Maisons d'Enfants à Caractère Social (foyers). Très tôt, il s'était inscrit dans des actes délictueux qualifiés de petite délinquance. La violence de ce jeune homme "border line" était notoire. A 14 ans, il agressait une assistante sociale et plus tard, une femme âgée. Tout cela avant son itinéraire sanglant et tragique de mars 2012 dans la ville rose et à Montauban.

On constate chez Merah la démission d'un père qui n'a aucunement investi sa fonction paternelle, repartant au pays et laissant à une mère dépassée la gestion d'une fratrie livrée à elle-même. Tout comme les frères Kouachi, exécuteurs de la tuerie du 7 janvier 2015. Eux-mêmes ont été placés très jeunes dans un foyer de l'enfance en Corrèze, à la campagne. Leurs parents étaient défaillants. Les professionnels qui sont intervenus auprès d'eux diront après leurs méfaits que, tant Chérif que Saïd étaient en quête de l'image paternelle absente. Ils vont se construire sur ce manque et cette frustration.

Plus récemment, c'est Hasna Aït Boulahcen, jeune femme de 26 ans qui se fait exploser le 18 novembre 2015 devant les forces de Police à Saint-Denis. La première femme Kamikaze de France a, dès l'âge de 8 ans, été placée dans des familles d'accueil et en foyers, consécutivement à des mauvais traitements dont elle a été victime, tout comme sa soeur et ses deux frères. Ses parents étaient séparés et son père était parti travailler en Moselle. (Nota Kikushiyo : depuis on a appris que durant l'assault elle n'aurait pas été Kamikaze mais que c'est l'explosion d'un de ses camarades qui l'aurait tuée.)

Enfin, lorsqu'on entend son ancien professeur de collège, on comprend que le bourreau du Bataclan, Ismaël Omar Mostefaï, ne savait ni lire, ni écrire et qu'à l'âge de 15 ans il était illettré. Il passait automatiquement de classe en classe, sans qu'à aucun moment la grosse machine de l'Education Nationale ne se questionne pour savoir si le système proposé à cet élève en échec était adapté. Peut-on demander une évaluation des sacro-saintes Zones d'Education Prioritaires (ZEP) ou bien est-ce tabou ? Quoiqu'il en soit, ne pourrait-on pas s'interroger sur la création de classes adaptées aux élèves en échec ou bien pour les élèves décrocheurs ? Un redéploiement des moyens serait opportun, me semble-t'il.

[Kikushiyo - Ajout du 20/01/2019 = Le procès actuel de l'attentat islamiste du Musée Juif de Bruxelles qui avait eu lieu le 24/05/2014, traduit Mehdi Nemmouche devant ses juges bruxellois. Son profil confirme l'hypothèse présentée, selon laquelle ce sont souvent d'anciens enfants placés en raison de délaissement parental, ou bien pour maltraitance, qui fomentent aujourd'hui les attentats qui nous touchent frontalement. Nemmouche a été abandonné par sa mère alors qu'il n'était qu'un nourrisson. Originaire de Tourcoing, c'est le département du Nord qui l'a placé dans une famille d'accueil de l'Aide Sociale à l'Enfance chez qui il est resté au moins dix années, voire quelques années de foyer en plus. En quête d'une image paternel qu'il n'avait pas, ce n'est qu'à l'âge de 9 ans qu'il a découvert la famille musulmane de son père. La religion qu'il revendique sans la connaitre, il la découvrira en prison où il s'est radicalisé avant de partir en Syrie.]

Donc, concernant ceux qui sont chargés des basses oeuvres et qui passent à l'acte, que constate-t'on ? Qu'il s'agit le plus souvent de jeunes désoeuvrés, déclassés, en rupture familiale qui cherchent une famille qui viendrait se substituer à celle qu'ils n'ont pas eue. Ainsi, plusieurs jeunes de la "cellule toulousaine" dont Mohamed Merah, les frères Clain, entre autre et de la cellule ariégeoise comme Thomas Barnouin et Quentin Le Brun (des convertis partis combattre avec daesh en Syrie), ont surinvesti "l'imam blanc" de l'Ariège, Olivier Corel, âgé de 69 ans, comme un gentil grand-père affable qui les invitaient dans sa maison d'Artigat, entre ses plants de tomates et ses salades. Plusieurs ont dû trouver chez lui l'idéal d'une image paternelle. Sa grande barbe blanche peut faire penser à celle du Père Noël. D'ailleurs, on lui confierait bien l'animation du repas de Noël à l'école maternelle. Précisons tout de même que ce Corel est un Frère Musulman Syrien, issu d'une mouvance extrêmement dure et qu'il a fuit la Syrie en 1973 pour venir s'installer en France. Il est naturalisé depuis 1983. Les apprentis terroristes viennent à son domicile sans être inquiétés, véritable médiathèque en ouvrages salafistes. En règle générale, les idéologues qui savent agréger autour d'eux des jeunes gens fragiles ont souvent des profils comparables aux gourous des sectes. On se souvient de la secte Aum Shinrikyo à Tokyo et de son gros nounours de gourou Shōkō Asahara (l'attentat au gaz sarin dans le métro de Tokyo le 20 mars 1995), nounours joufflu à qui on aurait donné le bon Dieu sans confession... si je peux m'exprimer ainsi.

Dans ces cellules djihadistes de Toulouse, des Buttes Chaumont, du gang de Roubaix, notamment, les cas sociaux existent à foison. Je les nomme ainsi car ils ne s'inscrivent pas dans une culture de référence, celle-là même qui est transmise par la famille. On dira d'eux qu'ils sont incultes (au sens de celui qui n'est pas inscrit dans une culture). Ils adoptent une posture haineuse envers les "autres" individus qui composent la société. En fait, les "autres" (les mécréants, les apostats et autres Kouffar,...) sont ceux qui se sont inscrits, tant bien que mal, dans une structure familiale fiable qui donne des repères. Se souvient-on des premiers moudjahiddines du gang de Roubaix en 1996 ? Ceux-là même qui rentraient de Bosnie où ils avaient combattus ? Ce furent les premiers en France à utiliser des armes de guerre pour braquer des supermarchés. Leur Gourou était Christophe Caze, un converti charismatique, étudiant en médecine et fin prosélyte islamiste qui avait impressionné par son érudition le jeune Mouloud Bouguelane. Kabyle, mais sans véritables connaissances de sa culture d'origine, Bouguelane avait aveuglément suivi Caze jusqu'en Bosnie. Auparavant, lui aussi avait été placé quelques années à la DDASS avant d'être adopté par un couple d'instituteurs. Sa mère l'avait renié lors de son procès en 2001. Avant cela, son géniteur avait été expulsé vers la Kabilie après avoir poignardé la soeur de Mouloud. Encore une fracture familiale à l'origine de la dichotomie entre l'absence d'un père, d'une part et le besoin inconscient de combler ce manque par un substitut haineux, d'autre part.

Je me suis rendu compte que je pouvais poursuivre, encore et encore, les exemples qui viennent confirmer que dans notre pays, il y a un véritable problème, tant dans le système de protection de l'enfance, que dans la gestion des élèves en échec scolaire. Ceux qui restent sur le bord de la route et qui finissent par en concevoir une certaine rancoeur. A partir de ce constat, il est nécessaire que les différents acteurs intervenants dans le champs de la protection de l'enfance fassent un aggiornamento et organisent les réformes qui s'imposent. En effet, malgré la loi du 5 mars 2007, on peut se rendre compte que le mythe du placement en structure collective reste tenace, ceci malgré son coût élevé, la promiscuité des enfants en internats et les carences de la prise en charge éducative. Il faut bien le reconnaître, le placement en foyer n'est pas la panacée. Parfois, c'est déplacer un problème d'un endroit (la famille) à un autre (le foyer), voire l'amplifier dans certains cas. C'est tout de même la famille qui reste le meilleur vecteur d'éducation. A présent, on a encore rien fait de mieux, jusqu'à preuve du contraire. Pour ce motif, je pense qu'il serait moins onéreux d'axer l'intervention sociale à l'intérieur même des cellules familiales qui dysfonctionnent et de répartir les moyens humains et financiers vers le contrôle des obligations parentales et orienter les aides vers les parents qui souhaitent vraiment assumer coûte que coûte la charge de leurs responsabilités, quitte à oser sanctionner lorsqu'il y a défaut d'éducation. Arrêtons une bonne fois pour toutes de culpabiliser en se voilant la face [sic]. Je reconnais qu'il y a des parents qui n'ont aucune compétence de parents, qui sont toxiques et qui délèguent trop facilement l'éducation de leurs enfants aux institutions. Mais que doit-on faire avec eux qui démissionnent trop facilement de leurs missions de parents et qui façonnent littéralement ceux que j'appelle des "Cas sociaux" ? En écrivant ces quelques lignes, j'ai conscience que ce type d'intervention peut être une ingérence de l'Etat au sein du Lumpenprolétariat, mais la société ne doit-elle pas réagir à l'hyperviolence structurelle dans laquelle nous tentons de survivre en maintenant ce minimum de lien social ?

Et puis, concernant le coût d'un placement en foyer, je suis parti de l'hypothèse d'une moyenne de 6 années de placement par terroriste, si j'arrondis la journée de placement à 200 euros (sachant qu'il existe des structures d'accueil dont le prix de journée peut être égal à 300 €, 400 € et parfois beaucoup plus). Pour Merah, Kouachi x 2 et Aït Boulahcen, les départements ont dépensés 1 752 000 euros. Près de 2 millions d'euros pour 4 mineurs qui sont devenus terroristes. Dans ce cas, ne pourrions-nous pas rallier la thèse du Docteur Maurice Berger qui, dans son ouvrage "L'échec de la Protection de l'enfance" (Ed.Dunod 2004) dé-construit le système de protection de l'enfance tel qu'il est organisé. Ici, je tiens à relativiser mon propos car tous les enfants placés ne deviennent pas terroristes, fort heureusement et même loin de là. Toutefois, dans les attentats de l'année 2012 et ceux de 2015, la proportion n'est pas à négliger et peut ouvrir à la réflexion.

Ce qui est certain, c'est qu'actuellement en France ce sont des bonnets d'âne et des cas sociaux qui tentent d'imposer leurs lois en commettant des attentats. Des individus "cassés" depuis leur plus jeune âge, parce que victimes de ruptures familiales, ou bien abîmés par des mauvais traitements et qui se sont construits sur des faux-semblants, comme l'idéalisation d'un père absent par exemple. Un père qu'ils finissent par fantasmer et dont ils gardent l'idéal de la quête bien vivace. Une faille les habite. Pour contenir ce morcellement psychique, cette peur du vide, de tels individus peuvent être contenus uniquement par des facteurs autoritaires qui s'imposent à eux et qu'ils recherchent : l'armée, la prison, les sectes religieuses ou bien une dictature dans laquelle tout leur serait imposé... comme l'autorité paternelle symbolique en quelque sorte.

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