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le Monde de kikushiyo
11 avril 2014

Terreur apache - de W.R. Burnett (Adobe walls - 1953)

"Ils se dirigeaient vers le sud, toujours le sud, voyageant la nuit et s'arrêtant le jour. C'était comme un cauchemar. Il semblait aux Blancs qu'ils chevauchaient depuis une éternité dans le désert et les montagnes, et qu'ils resteraient à jamais assis sur une selle, tournés vers le sud." (p.181)

terreur apache

 La nouvelle collection (novembre 2013) lancée par Actes Sud, "L'Ouest, le vrai", est dirigée par Bertrand Tavernier. Elle présente des ouvrages de littérature western. Une forme de littérature que je ne connaissais pas, si ce n'est à travers la bande dessinée. C'est avant tout le cinéma et la télévision qui se sont emparés du genre western. Le prisme des studios hollywoodiens véhicule le plus souvent des images et des représentations tronquées quant aux relations avec les indiens qu'on fait le plus souvent passer pour des sauvages sanguinaires. Le livre de William Riley Burnett ne présente pas une relation édulcorée. Forcément, lorsqu'on met face à face des protagonistes qui ont le projet de se détruire, on peut se douter que le mot "courtoisie" n'exprime pas au mieux leur mode d'échange et de communication. Les propos sont crus et absolument pas politiquement corrects, mais comme ils devaient l'être à l'époque : "Ce que les Blancs appelaient intelligence, les Apaches le méprisaient ; et la docilité, chez eux, n'était que l'expression d'une révolte contenue." (p.39) Et Walter Grein ne les aime pas les Apaches. Lui qui est un traqueur de renom, à la tête d'un groupe d'éclaireurs chargés de retrouver Toriano, le chef Apache qui s'est enfui de la réserve avec un groupe de fidèles pour semer la terreur : "Eh bien, les Apaches aussi ont un code. Le voici : le plus fort, c'est celui qui tue le plus de monde. Après lui vient le plus grand voleur. Et en troisième position - mais c'est aussi une force -, le plus grand menteur." (p.136)

L'atmosphère de ce récit est ralentie par un soleil lourd qui tape sur les crânes des éclaireurs qui évoluent les uns après les autres dans les plaines arides de l'Arizona, à la poursuite de Toriano. L'auteur décrit des paysages typiques avec une extrême justesse et beaucoup de poésie, ce qui participe à la qualité de l'histoire. Durant cette traversée les chevaux s'épuisent, les hommes souffrent du manque d'eau. On est en 1886, en pleine course au développement, deux amériques s'opposent. Si le train participe à la conquête d'un sud ouest encore sauvage, l'Est et New York scintillent de leurs mille lumières de succès industriels et de croissance urbaine exponentielle.  Il y a plus de vingt années que les derniers coups de feu de la guerre de Sécession ont résonnés. Bien entendu, les rancoeurs Nord-Sud existent encore, mais désormais, ce n'est plus qu'une seule armée qui impose la loi des États-Unis d'Amérique sur l'ensemble de son territoire.

Monument Valley

L'acharnement que met Grein à retrouver le chef Toriano en terre hostile est une véritable quête personnelle. On pourrait faire un parallèle avec le capitaine Achab à la recherche de Moby Dick. En effet, ce livre à quelque chose de Melvinien dans sa manière de faire émerger peu à peu l'individu traqué. On fini par ne plus trop savoir si Toriano existe vraiment ou s'il ne serait pas plutôt une sorte de fantasme.

 La postface de ce très bon roman est écrite par Tavernier. Il me fait découvrir W.R. Burnett, auteur à succès de romans noirs, dont le très connu "Quand la ville dort" (The Asphalt jungle) porté à l'écran en 1950 par John Huston, avec Marilyn Monroe. En 1941, Burnett avait déjà écrit le scénario de son roman "High sierra" (La grande évasion) que la Warner confiera à Raoul Walsh pour la réalisation. Mais, Burnett qui se qualifiait de "Rebelle" reconnaissait dans une interview qu'il préférait ses écrits sur l'Ouest, "Terreur apache" le confirme.

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